Cet article sur les semences Hybrides à CMS est le 4ème article d’une série sur les semences, un enjeu sociétal essentiel, afin que vous puissiez faire vos choix (culture, achat de légumes) en ayant conscience des problématiques qui se cachent derrière.

Je me suis bien trituré les méninges afin de parler avec simplicité d’un sujet difficile techniquement et le rendre abordable. Prenez votre temps pour lire cette série d’articles même si c’est un peu plus difficile que d’ordinaire. Il y a beaucoup de bonnes raisons de prendre connaissance de ce sujet : prendre soin de votre corps, ce que nous laisserons aux enfants demain, soutenir les paysans…

Hybrides à CMS, lorsque les OGM s’invitent dans votre magasin Bio

Je vous invite éventuellement à relire l’article précédent et à vous remettre en mémoire ce que sont les Hybrides à CMS. Je ne sais pas pour vous, mais moi, les deux dernières techniques çà me plaît moyen. Qu’on aille irradier des cellules pour les stériliser ou trafiquer des cellules de choux avec celles de radis, çà me laisse perplexe.

L’utilisation de cette méthode de sélection a remué la filière professionnelle Bio car elle relève du génie génétique, la barrière des espèces est transgressée, de même que la barrière cellulaire. Ces variétés sont donc génétiquement modifiées, un élément du génome mitochondrial a été remplacé, d’une manière qui ne se produit pas naturellement, par un élément génétique en provenance d’une autre espèce.

Pourtant, ces variétés sont juridiquement considérées comme des variétés non-OGM,

… car obtenues par fusion cellulaire, la fusion de protoplastes étant une technique exclue des techniques donnant lieu à l’obtention d’un organisme génétiquement modifié au sens des législations européennes.

Pour le moment, ces variétés sont ainsi autorisées et cultivées en agriculture biologique.

Par contre, ces variétés hybrides à CMS sont interdites de culture en agriculture Biodynamique (merci à Demeter qui les a interdit en 2005). Elles sont aussi interdites par des organisations professionnelles allemandes (Naturland depuis 2008, Bioland depuis 2009), par le groupement de producteurs breton « BIOBREIZH » (depuis 2000 ! Vive les bretons, Félicitations !).

Mais alors, cela veut-il dire que l’on peut trouver des choux OGM en bio ?

Voici les infos que j’ai pu trouver :

« Les variétés hybrides F1 à CMS sont-elles autorisées en agriculture biologique ? L’agriculture biologique interdit l’utilisation des OGM (et des produits issus d’OGM) qui figurent dans le champ d’application de la directive 2001/18. Cette interdiction ne concerne donc pas, pour le moment, les variétés hybrides à CMS. Ces variétés sont donc couramment utilisées en agriculture biologique. Mais les instances professionnelles de l’agriculture biologique françaises et européennes se sont récemment prononcées contre cette utilisation. » (1)

« Même en agriculture biologique on a recours à des espèces issues des méthodes de production conventionnelle, (…) En ce qui concerne l’endive, il existe pas moins de 20 variétés hybrides à CMS que l’on cultive dans les serres conventionnelles. A l’échelle de l’Europe c’est plus de 270 variétés hybrides à CMS qui circulent. » (2)

Un peu plus loin dans cet article, parlant des approvisionnement des magasins en bio en Allemagne : “Malgré tous ces efforts, il nous est difficile même à nous de couvrir en totalité la demande en produits frais hors CMS« ,  “Pour ce qui est de la marchandise en provenance d’Europe et que nous importons par le biais de nos fournisseurs à l’étranger, nous n’avons à l’exception de „BioBreizh“ aucune information fiable, à savoir si ce sont des légumes issus de variétés hybrides à CMS ou non“. (2)

« La majorité des maisons grainières s’engage dans la voie de la CMS. Demain la majorité des variétés commerciales de chou-fleur le sera…Il est donc primordial pour les bios de reprendre en main la sélection de leurs variétés, via notamment par la maintenance et la multiplication de variétés fermières, de terroir, et l’utilisation de variétés commerciales non Cms (certaines entreprises semencières comme Bejo ou Vitalis se sont positionnées contre). » (3)

Comment ne pas manger des choux OGM ?

Idéalement, il faudrait connaître la variété du chou que vous achetez et consulter une liste des variétés hybrides non issues de la technique CMS obtenue par fusion de protoplastes. Cette liste serait disponible sur le site de Demeter et de l’ITAB mais je ne l’ai pas trouvée. J’ai trouvé par contre une liste datant de 2009 des choux Hybrides à CMS sur le site du GRAB :

Chou Variétés CMS
Chou-fleur Serca, plessi, dexter, atalaya, titouan, castellium, tirol, kami, drakar, optimist, trofeo, cendis
Brocoli Chevalier, marathon, parthenon, spiridon
Cabus rouge Regilius, fuego
Cabus blanc Caïd
Milan Estoril, othello

Merci à Florence qui m’a envoyé le lien vers la liste DEMETER des variétés de légumes non produites par des techniques de fusion protoplasmique (2015).

Merci à Christian, maraîcher à plus de 1000 m d’altitude, qui m’a envoyé le lien vers la liste positive 2018-2019 sur le site de la BIO autrichienne (liste en Allemand).

Privilégiez les producteurs locaux. Si vous connaissez le maraicher et qu’il fait ses propres graines ou utilise des variétés anciennes de choux, vous avez gagné le gros lot, un bon chou NATUREL !

Ou privilégiez votre magasin BIO. Choisissez dans votre magasin bio un chou de variété ancienne ou un chou cultivé en biodynamie.

Une petite synthèse s’impose, non ?

Pour faciliter la production de semences hybrides, les labos modifient directement le cytoplasme de la cellule afin de rendre la plante parentale de la lignée femelle stérile et obtiennent ainsi des hybrides à CMS. Cela concerne en particulier des choux, mais aussi des poireaux, des navets, des endives, le tournesol, le colza.

Ces hybrides à CMS ne sont pas considérés juridiquement comme des OGM. Ces variétés sont donc autorisées et potentiellement présentes en bio. Des acteurs de la filière bio ont déjà interdits l’utilisation de ces variétés ou se sont prononcés contre. Pour s’assurer qu’un légume n’est pas issu d’un hybride à CMS, il faut demander au maraicher où il se fournit en plants/semences pour savoir s’il ya de la CMS derrière. De nombreux semenciers bio se sont prononcés contre la CMS donc si le maraicher se fournit chez eux, c’est gagné.

Privilégiez les producteurs locaux, la filière Biodynamie et les magasins Bio.

Et bien évidemment, si vous achetez un chou pas bio dans un supermarché, çà pourrait bien être un chou OGM … même si c’est pas écrit. Pierre Rabhi a bien raison lorsqu’il dit qu’il faut se souhaiter bonne chance plutôt que bon appétit !

Vous avez apprécie cet article ? N’hésitez pas à me poster un commentaire en-dessous, c’est fait pour !

Nota : je ne suis pas une spécialiste du domaine, mais une simple jardinière qui essaie de retransmettre en termes simples ce que j’ai pu comprendre avec mon background d’ingénieur. Si vous êtes un lecteur averti sur le sujet, un paysan semencier, n’hésitez pas à poster votre éclairage sur le sujet et apporter votre contribution à cet article !

Nota bis : j’ai suivi une année de formation agricole en 2009/2010, le BPREA (Brevet professionnel de responsable d’exploitation agricole) et en un an de formation à temps complet, on ne m’a jamais parlé des hybrides à CMS …